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SOMERSET SANS SON BUREAU AGRICOLE

Ophélie DOIREAU [email protected]

Les municipalités éloignées de Winnipeg tentent chacune à leur manière de rester attractives. C’est pourquoi Aurel Pantel, préfet de la municipalité de Lorne et agriculteur à Somerset, regrette la récente décision provinciale d’éliminer des bureaux agricoles dont celui de son village. Et déjà il s’inquiète des possibles répercussions de la réforme scolaire.

Pour bien des municipalités éloignées de la capitale manitobaine, retenir leur population et rester attractives représente un défi, qui peut devenir majeur quand des services ferment leurs portes à cause de décisions gouvernementales.

À l’exemple de la municipalité de Lorne, dont le préfet Aurel Pantel est préoccupé par la fermeture du bureau agricole et par les possibles conséquences du projet de réforme scolaire.

Depuis déjà plusieurs années, la municipalité de Lorne est impactée par diverses décisions gouvernementales. Aurel Pantel, agriculteur et élu municipal depuis 30 ans, raconte.

« En 2010, le gouvernement provincial a décidé que les municipalités qui ne comptaient pas 1 000 personnes devaient se joindre à d’autres. C’est ainsi que Notre-dame-deLourdes et Somerset ont rejoint Lorne.

« Depuis, on s’occupe de payer quelques petites affaires pour eux, comme les déchets ménagers. Mais on a décidé de garder un bureau administratif à Notre-dame-deLourdes. »

Depuis le 1er avril, par décision du gouvernement provincial, 21 bureaux agricoles ont fermé, dont celui de Somerset. Une décision regrettable pour Aurel Pantel, qui met sa double casquette d’agriculteur et de citoyen de sa municipalité pour aborder la question.

« Depuis 1978, je tiens la ferme qu’avait mon père. On avait des animaux, dont des cochons de races pures. J’avais donc la ferme, et à côté, j’ai aussi travaillé pendant 15 ans comme évaluateur de taxes à Morden.

« Après le gros crash de 2008, d’un point de vue économique ce n’était plus possible que je m’occupe des cochons. Alors j’ai arrêté les animaux. Depuis ce temps-là, je fais uniquement de la culture de céréales sur 320 acres. »

Notre monde chez nous

« J’ai vraiment été très déçu quand la Province a annoncé qu’elle allait fermer notre bureau agricole. Il y avait huit personnes qui travaillaient là. Ces personnes-là, pendant leur break, elles allaient au café ou encore à l’épicerie. Il va donc y avoir un impact sur les commerces locaux.

« Il faut savoir qu’en plus, des colonies huttérites venaient à ce bureau quand elles avaient besoin d’aide. Maintenant, il faudra se rendre à Morden, c’est-à-dire faire 45 milles, soit 40 minutes juste pour s’y rendre.

« Le gouvernement justifie la fermeture en disant que les derniers mois, il n’y avait presque personne dans les bureaux. Est-ce qu’il faut rappeler que c’est la pandémie?

« Et la Province explique aussi qu’on peut faire nos démarches on line. Mais tout le monde n’a pas internet. Tout le monde ne sait pas se servir d’internet et il y a bien des personnes qui sont plus à l’aise avec un agent.

« Pensons juste aux colonies huttérites qui n’ont pas forcément d’ordinateurs pour des raisons qui les regardent.

« Si je prends mon cas, je faisais déjà des choses à l’ordinateur. Mais j’ai toujours besoin d’appeler pour de l’aide, parce qu’il y a quelques changements dans le nom des programmes parfois. Ce sont des petits détails qui peuvent devenir très frustrants quand on est devant notre écran et que ça ne marche pas. »

La fermeture du bureau agricole est un coup dur pour une municipalité qui tente de rester attractive. Aurel Pantel, cette fois en sa qualité de préfet, souligne les efforts faits à Somerset.

« On essaye de garder notre monde chez nous. On est bien conscient que ce n’est pas possible de retenir tout le monde, mais on aimerait que Somerset reste une option dans la tête des gens. On sait qu’à Notre-dame-de-lourdes, les gens reviennent.

« On a même entamé des travaux pour faire venir la fibre optique à Somerset, comme ça a été fait à Notre-dame-deLourdes. Le projet est presque terminé.

« On souhaiterait que des jeunes qui finissent l’université s’installent chez nous. On veut leur offrir une belle vie. Alors si des services disparaissent, ça devient compliqué. »

Et la réforme scolaire

Dans la même veine, Aurel Pantel se dit préoccupé par le projet de réforme scolaire. « Actuellement, on fait partie de la Division scolaire Prairie Spirit. Si la réforme prend place, on serait dans la région de Prairie Rose, et on serait regroupé avec Carman, un gros village qui compte entre 3 000 et 3 500 personnes à 40 milles de Somerset.

« On a déjà eu à faire une fusion il y a quelques années. Avant d’être Prairie Spirit, on était dans Mountain.

« Je peux parier dix contre un que le bureau de la Division scolaire va déménager à Carman. Une autre préoccupation, c’est de savoir si notre école secondaire va fermer à Somerset pour que nos jeunes aillent à Carman.

« Dans la réforme, il est prévu de supprimer la limite de temps dans l’autobus. Alors nos jeunes pourraient passer 1 heure 30 ou 2 heures dans un autobus, ce qui rendrait l’option envisageable de supprimer l’école. C’est très troublant.

« Je comprends que ce n’est pas toujours facile pour le gouvernement de prendre des décisions. En tout cas, on ne peut pas faire l’unanimité. Mais si on continue de fermer des services, qu’estce qu’on cherche à faire? On a l’impression qu’on veut tuer les villages. Sans école et sans enfants, il n’y a plus de vie dans le village. »

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2021-05-05T07:00:00.0000000Z

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