Shelly Glover veut déjouer les pronostics
Lors d’un débat organisé mardi 28 septembre par le Conservative club de Winnipeg, les deux candidates, Shelly Glover et Heather Stefanson ont pu exposer leurs idées aux membres du Parti progressiste-conservateur.
Hélène LEQUITTE Collaboration spéciale
Shelly Glover, ancienne ministre fédérale du Patrimoine canadien et des langues officielles, candidate contestataire, et adversaire d’heather Stefanson vise la chefferie du Parti progressisteconservateur au Manitoba, le 30 octobre prochain, à la suite de la démission du premier ministre Brian Pallister.
Aujourd’hui, si elle compte remettre sur le droit chemin le parti, le style de cette ancienne policière détonne de celui de sa concurrente.
«J’ étais très déçue de voir que Mme Stefanson et son équipe voulaient avoir un couronnement. Ce n’est pas dans l’intérêt de notre parti », lance sans détour Shelly Glover. Avec l’appui des deux tiers des membres du caucus provincial, son opposante directe, Heather Stefanson, est en effet la favorite de la course.
« Une bonne partie des députés soutiennent Mme Stefanson et se sont déjà déclarés », corrobore le politologue Raymond Hébert.
Shelly Glover affirme que le système pour la sélection du nouveau chef est injuste. C’est d’ailleurs la raison principale qui l’a fait se lancer dans cette course. C’est désormais un véritable retour en force qu’elle souhaite opérer sur la scène politique.
| Son retour dans la police
Depuis la fin de son mandat de ministre en 2015, son retour dans la police ne s’est pas passé sans accroc. Shelly Glover est montée au créneau, dénonçant des attitudes irrespectueuses, voire du harcèlement sexuel de la part de certains policiers à l’égard d’homologues féminins.
« Quand j’étais dans la police pendant deux ans et demi (après 2015), je peux vous dire que j’ai vu des choses et que j’étais choquée. J’ai reconnu tout de suite que l’on avait des bad players. On avait certains policiers qui tiraient avantage de leur autorité et faisaient des choses; je ne pouvais pas rester sans réagir », pointe-t-elle.
D’après elle, plusieurs femmes ont fait l’objet, notamment, de commentaires déplacés.
« J’ai pris ma retraite à un moment où j’avais indiqué à notre chef que les abus sexuels dans notre service étaient ignorés », résume-t-elle.
Interrogée par La Liberté pour réagir à ces accusations, la police de Winnipeg a répondu et a clos le chapitre.
« Le service de police de la ville s’engage à offrir un milieu de travail respectueux à tous ses employés. Nous prenons les plaintes comme celles-ci très au sérieux. Cependant, le Winnipeg Police Service (WPS) se refuse à tout commentaire sur cette affaire ».
| L’affaire Habitat pour l’humanité
Shelly Glover est donc sans conteste une femme de caractère, au style musclé qui prône la loi et l’ordre, mais qui, selon certains, peut déroger, parfois aussi, à la règle. Le lancement de sa campagne électorale devant un organisme de charité, Habitat pour l’humanité, aux couleurs identiques de celles de sa campagne a fait couler beaucoup d’encre.
En effet, selon les règles établies par l’agence du revenu du Canada, il est « interdit aux organismes de bienfaisance de consacrer toute partie de leurs ressources pour soutenir un parti politique ou un candidat à une charge publique, ou pour s’y opposer, que ce soit directement ou indirectement. »
Shelly Glover répond. « Les couleurs, c’est par pure coïncidence. Le bleu c’est notre parti, le vert c’est l’environnement, ce n’est pas du tout mon intention d’insinuer une participation de leur part ».
Même son de cloche du côté de l’organisme qui dit aussi n’avoir jamais eu l’intention de soutenir la candidate, mais qui reconnaît son erreur en ayant laissé se tenir cette conférence de presse sur son terrain.
Shelly Glover se présente elle-même comme une personne à l’écoute des gens.
« Elle va mener une campagne populiste alors qu’heather Stefanson aura du mal à montrer sa personnalité, étant obligée de défendre constamment le legs de Brian Pallister », précise Raymond Hébert.
Doublement vaccinée, Shelly Glover encourage les gens à le faire. Cependant, dans la presse, elle a déclaré être opposée à la vaccination obligatoire et dit haut et fort, craindre qu’il n’y ait des répercussions négatives sur le personnel soignant comme des licenciements.
Certains l’accusent de désinformation. Shelly Glover clarifie sa position.
| Position sur la vaccination
« Je ne crois pas qu’on devrait enlever [aux professionnels de la santé] leurs emplois. Je vous donne l’exemple d’une infirmière qui est enceinte. Son médecin lui a dit qu’elle ne devrait pas prendre de vaccin, car elle peut avoir des complications avec son bébé. C’est une infirmière qui a travaillé fort pendant la pandémie et puis maintenant on lui dit : écoute, vous prenez le vaccin ou nous allons vous tester trois fois par semaine.
« La façon dont elle comprend ça et que d’autres professionnels de la santé comprennent ça, c’est qu’après avoir été testés, ils ne peuvent pas travailler jusqu’à ce qu’un résultat négatif arrive. Et ça, ça peut prendre 24h.
« Disons que l’infirmière travaille lundi, elle prend le test lundi, ça dit négatif, elle revient mardi. Mercredi, elle reprend le test, elle revient jeudi. Mais cette personne a une famille.
Elle ne peut pas voir son temps de travail réduit.
« Alors ça, ça m’inquiète beaucoup parce que ce n’est pas son choix. C’est là où je suis contre les vaccins obligatoires. »
Une explication qui ne cadre pas du tout avec celle des autorités de santé publique. Contacté par La Liberté pour demander des clarifications sur ce sujet, un porte-parole du ministère de la Santé et des Soins aux personnes âgées précise :
« Les employés non vaccinés ou partiellement vaccinés qui travaillent dans certains secteurs du gouvernement doivent avoir été testés négatifs au COVID-19 dans les dernières 48 heures pour pouvoir travailler. Selon les quarts de travail, cela pourrait être jusqu’à trois fois par semaine. Cela se fera par des tests rapides. Les résultats des tests rapides antigéniques peuvent être lus en 15 minutes. »
Également, le ministère éclaircie sa position sur la potentielle perte d’emploi des professionnels de la santé.
« La vaccination n’est pas une condition d’emploi. En vertu de l’ordonnance (du 24 septembre), les employés concernés qui choisissent de ne pas se faire vacciner, qui ne sont pas complètement vaccinés ou qui ne peuvent pas fournir la preuve de leur vaccination avant le 18 octobre subiront régulièrement un test COVID-19. »
| Une différence marquée?
En attendant, Shelly Glover clame sa différence par rapport au style de Brian Pallister. Elle dit vouloir mener des consultations, notamment, dans le cadre de l’initiative de réforme de l’éducation.
« C’est important de parler avec les gens, non seulement avec les experts, mais aussi avec les enseignants et les parents, il faut inclure tout le monde », insiste-t-elle.
Dans cette course à la chefferie, Shelly Glover se démarque donc par son indépendance, mais aussi par son franc-parler.
« Elle est la candidate contestataire du régime Pallister, elle va se positionner comme ça », affirme Raymond Hébert.
Contactée par La Liberté à de nombreuses reprises pendant plusieurs semaines, Heather Stefanson n’a pas accordé d’entrevue exclusive au journal. Elle a cependant partagé quelques commentaires lors du seul débat entre les deux candidates.
Plus de 200 personnes étaient réunies en présentiel et une centaine en virtuel pour suivre le débat animé par l’ancienne maire de Winnipeg, Susan Thompson.
La discussion a duré un peu plus d’une heure et a abordé différents thèmes : le leadership, les infrastructures, les personnes en situation de handicap, l’éducation, la santé, le changement climatique et la réconciliation.
À plusieurs reprises, la candidate Shelly Glover s’est exprimée brièvement en français sur certaines questions.
Quant à la candidate, Heather Stefanson, cette dernière, a évoqué la question des francophones du Manitoba en entrevue avec La Liberté, à la fin du débat.
« Notre gouvernement a pris beaucoup de mesures ces dernières années pour participer à l’épanouissement des francophones du Manitoba. Je pense au projet de loi 5 soit La Loi sur l’appui à l’épanouissement de la francophonie manitobaine que Rochelle Squires avait introduit à l’époque.
« C’est incroyablement important au Manitoba de respecter les enjeux francophones et les services en français. Si je suis élue, je m’assurerais d’aller de l’avant dans ce domaine en renforçant les partenariats avec la communauté francophone.
« Pour continuer de répondre correctement aux besoins des francophones du Manitoba, on doit s’assurer d’avoir de la rétroaction de leur part et de collaborer avec des partenaires clés. »
Sur la question du leadership, Shelly Glover en a profité pour tacler son adversaire en indiquant que « Madame Stefanson est restée coincée dans les coulisses pendant la pandémie alors que j’étais en première ligne comme bénévole dans les foyers de soins de longue durée. »
Sur cette même question, les deux candidates s’accordent pour être plus collaboratives et à l’écoute.
Les infrastructures sont une grande priorité pour les deux candidates. Heather Stefanson a profité de l’occasion pour attaquer, à son tour, Shelly Glover, qui souhaite relancer le projet de centre correctionnel à Dauphin.
« Pendant qu’elle construit des prisons, nous sommes concentrés à construire l’économie. »
Une autre priorité pour les deux candidates est l’enjeu de la réconciliation. Du côté de Shelly Glover, la candidate est sans appel.
« La réconciliation passe par des excuses. Alors la première chose que je ferais, c’est d’offrir officiellement des excuses aux peuples autochtones. »
Elle souhaite également mettre en place « un Conseil consultatif des peuples autochtones qui rendrait des comptes directement à la Première ministre. »
Pour sa part Heather Stefanson a listé tous les dirigeants autochtones qu’elle a rencontrés et a expliqué vouloir travailler sur différents projets de développement économique.
Politique Provinciale
fr-ca
2021-10-06T07:00:00.0000000Z
2021-10-06T07:00:00.0000000Z
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La Liberte